Avancée en droit des victimes

La reconnaissance d’un besoin en tierce personne pendant l’hospitalisation pouvant donner lieu à indemnisation

Le besoin d’assistance de la personne hospitalisée

Une vision réductrice des besoins de la personne hospitalisée amène à considérer que la prise en charge d’une victime dans le secteur hospitalier suffit à répondre à ses besoins.

C’est faux, d’autant que la prise en charge hospitalière a nettement évolué ces dernières années dans un contexte de contrainte du budget consacré à la santé : explosion des interventions en ambulatoire, réduction du personnel hospitalier…

Il est communément admis que les équipes médicales et paramédicales ne peuvent plus assurer intégralement pour tous les patients l’aide aux actes élémentaires de la vie quotidienne (notamment la toilette), et que de moins en moins de petits matériels sont fournis par les hôpitaux (serviettes, nécessaires de toilette…).

De plus, outre l’aide aux actes élémentaires de la vie quotidienne, une victime peut avoir besoin, pendant sa période d’hospitalisation, d’une aide pour la gestion des tâches administratives (par exemple pour l’envoi de l’arrêt de travail initial, pour gérer les modalités d’hospitalisation telle que la mise en place de la télévision), pour assurer l’apport d’affaires personnelles (nécessaire de toilette, vêtements, effets personnels, courriers…), pour l’entretien du linge, pour assurer les courses des petits matériels non fournis ou insuffisamment fournis par l’hôpital (comme les protections hygiéniques ou le dentifrice), pour accompagner les enfants lors d’une visite d’un parent à l’hôpital, s’occuper de ses animaux de compagnie, bref, pour l’accompagnement général dont a besoin une personne hospitalisée.

Par ailleurs, la période d’hospitalisation peut entrainer une réattribution et une réorganisation des tâches qu’assurait la victime hospitalisée telle que la gestion des enfants, d’une personne handicapée ou d’une personne âgée demeurant au foyer.

A cet effet, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a pu confirmer le rejet d’une demande tendant à la suspension pendant une période d’hospitalisation d’une rente tierce personne déjà allouée (Civ. 2, 15 janvier 2015 n°14-10438).

Le principe de réparation intégrale du préjudice commande donc une indemnisation de l’assistance par tierce personne pendant les périodes d’hospitalisation.

Le besoin en tierce personne pendant la phase d’hospitalisation n’est quasiment jamais reconnu par les experts, il était donc difficile d’obtenir une indemnisation de ce chef.

On peut aujourd’hui espérer une évolution dans la mesure où la Cour de cassation, dans plusieurs décisions récentes, a reconnu l’existence d’un besoin en tierce personne pendant une période d’hospitalisation, et de fait considéré que ce besoin devait donner lieu à indemnisation.

La reconnaissance jurisprudentielle bienvenue du droit à l’indemnisation du besoin en tierce personne de la personne hospitalisée

Dans un arrêt du 10 novembre 2021, la Cour de cassation a jugé pour la première fois que l’assistance par une tierce personne ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime, mais indemnise sa perte d’autonomie :

Vu l’article 1240 du code civil et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

L’arrêt retient que M. [L] réitère sa demande tendant à ce que soient pris en compte ses besoins pendant les fins de semaine où il est rentré à son domicile, son besoin d’assistance pendant son hospitalisation et son besoin d’assistance pour la prise en charge de ses enfants, les fins de semaine où il était censé les recevoir.

L’arrêt énonce que les besoins supplémentaires évoqués par M. [L], qu’il n’a pas abordés lors de l’expertise, sont insuffisamment justifiés et débordent du préjudice strictement personnel qu’il a subi. Il en déduit que sa demande sur ce point sera rejetée.

En statuant ainsi, alors que le poste de préjudice lié à l’assistance par une tierce personne ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime, mais indemnise sa perte d’autonomie la mettant dans l’obligation de recourir à un tiers pour l’assister dans l’ensemble des actes de la vie quotidienne, la cour d’appel a violé l’article et le principe susvisés.

Civ. 2, 10 novembre 2021 n°19-10058

La Cour de cassation a confirmé cette position dans un arrêt rendu le 8 février 2023 :

Vu l’article L. 1142-1, II, du code de la santé publique et le principe d’une réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

Il résulte de ce texte et de ce principe que le poste de préjudice lié à l’assistance par une tierce personne ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime, mais indemnise sa perte d’autonomie la mettant dans l’obligation de recourir à un tiers pour l’assister dans l’ensemble des actes de la vie quotidienne.

Pour limiter l’indemnisation allouée au titre de l’assistance temporaire par une tierce personne, l’arrêt retient qu’elle n’est pas due pendant les périodes où Mme [S] a été hospitalisée dès lors que l’hospitalisation tend à suspendre les contraintes de la vie quotidienne et garantit au patient un niveau élevé de sécurité, et en déduit que la rétribution supplémentaire d’une tierce personne pendant la période de déficit fonctionnel temporaire total est sans objet.

En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a écarté par principe toute indemnisation de l’assistance par une tierce personne pendant les périodes d’hospitalisation de Mme [S], a violé l’article et le principe susvisés.

Civ. 1, 8 février 2023 n°21-24991


Laura Costes avocat à Toulouse spécialisé en droit pénal et effacement de fichiers

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